Alcool et santé
Alcool et santé
Dr Eric Hispard, alcoologue, Paris 14ème
« Le trajet de l’alcool, c’est important de le décrire parce qu’au fond, la prise d’alcool est un peu multiple. Il faut rappeler qu’on commence simplement à l’ingérer. On voit d’ailleurs qu’au début, c’est assez agressif. C’est un peu fort. Les gens vont avoir du mal, un petit peu. Ca va passer au niveau de l’oropharynx, puis de l’œsophage, puis dans l’estomac. Ca paraît une évidence, mais c’est très important. Et c’est là, effectivement, que les échanges vont se faire et que l’alcool va passer dans la circulation sanguine. C’est ce qui va s’appeler l’alcoolémie. Très, très rapidement, parce qu’au fond, quand on a l’estomac vide, ça va aller très vite. Après, il y a tout un circuit où tous les systèmes habituels vont fonctionner. »
Voix off
« A faible dose, le foie transforme l’alcool ingérée qui est éliminée complètement. C’est d’ailleurs sa fonction normale dépuration. Mais, lorsqu’on boit trop, c’est l’embouteillage. Le foie ne peut pas accélérer son rythme de fonctionnement et il sature. L’alcool passe alors dans le sang où il s’accumule et se propage à tous les organes, cœur, muscles, cerveau. Et c’est là que les ennuis commencent. Troubles de la vision, des réflexes. Perte de l’équilibre. »
« Le piège de l’alcool, c’est son côté festif, convivial, agréable, culturel. Faire la fête. Ca commence par quelque chose qui est vécu par tout le monde, par exemple, dans notre pays, culturellement, comme l’expression d’une ponctuation de la vie. Ce qui est important à retenir, c’est qu’au fond, une prise d’alcool, même faible, un verre de, quelle qu’en soit la dose, peut avoir des petits effets si nous ne sommes pas habitués à en prendre. Il y a des personnes qui vont mieux tolérer la quantité d’alcool qui est prise. Et c’est variable d’un moment à un autre même de la journée. Nous ne sommes pas égaux. Et il faut dire aux jeunes que la plupart du temps, il y a une fosse idée de la manière de bien ressentir, tolérer les champions de l’alcoolisation, les paris qui se font en disant, tu es capable de prendre tel ou tel… Il y a ceux qui tiennent bien. Ceux qui tiennent bien, on a démontré qu’à distance ceux sont ceux qui peut-être tolèrent pieux l’alcool. Mais, cette courbe de tolérance va faire qu’au bout d’un moment, ils vont monter leur quantité. Ceux sont ceux-là qui sont le plus en danger de devenir un jour dépendant 10 ou 15 ans après. »
Un inconnu
« J’avais un cursus scolaire bien carré. Je voulais travailler dans l’hôtellerie de luxe. Et, petit à petit, je ne me levais plus le matin, je n’allais plus à mes cours, je buvais, j’avais 16 ans. Je dormais la journée et je sortais la nuit. Il n’y avait plus aucune règle, plus aucune loi, plus aucun désir. Je n’existais plus. Ca a duré huit ans. J’ai touché un fond à 20ans. C’était atroce. C’est là que je venais me saouler. »
Voix off
« Avec les moyens modernes d’investigation en médecine nucléaire, par exemple, on a pu observer comment l’alcool agissait sur le cerveau. On peut presque le suivre à la trace. Sur cette image, le cerveau affiche des zones actives, là, en jaune et des zones affaiblies en bleu. En fonction de la quantité d’alcool, les couleurs vont se modifier. Par exemple, celui qui arrête de boire peut récupérer l’usage des zones touchées. »
Dr Eric Hispard
« Ceux qui ne tolèrent pas très bien l’alcool, vont être très, très vite, même avec des quantités relativement modestes, peut-être dans un petit début de trouble du comportement qui va être très simple. C’est le problème des alcoolémies au niveau de la route, c’est qu’on a l’impression qu’on est plutôt performant, qu’on va bien, qu’on est désangoissé, que tout va bien et qu’évidemment, on est en état de conduire, de faire des tas d’actes de la vie quotidienne.
Voix off
« Justement, pour mieux évaluer leurs réflexes, des jeunes ont accepté de tester leurs réactions mais sur un circuit. Test de freinage, à jeun, pas de problème. Puis, après avoir consommé de l’alcool, c’est là que les réflexes vont manquer. Concluant, non ? Même expérience, mais de nuit, cette fois. A jeun, d’abord. Puis, après quelques verres. C’est vrai que l’on sous-estime toujours sa consommation d’alcool et son impact sur notre comportement. Mais alors, il ne faut jamais boire ? »
Dr Eric Hispard
« Je crois que ce qu’il faut, c’est avoir la logique de savoir qu’il y a une prise de risques à toute alcoolisation. Et qu’il faut savoir, dans nos modes de vie, quand est-ce qu’on va prendre ce risque là et savoir l’accompagner. C’est à dire au fond, c’est gérer ses conduites d’alcoolisation. Vous allez faire la fête, c’est bien normal. Donc, on va nécessairement dans un petit trop, dans un petit excès. Et à ce moment, et bien, comment fait-on ? Est-ce qu’on repart en voiture, est-ce qu’on dort au domicile, est-ce qu’on voit effectivement comment on sait qu’il va bien y avoir quelque chose qui va nous mettre un tout petit peu dans une position d’excès. »