Le Bestiaire, ou Cortège d’Orphée. Alcools. Recueil de poèmes, Vitam impendere amori. Guillaume Apollinaire
Les poèmes du Bestiaire sont illustrés des bois de Raoul Dufy
À Élémir Bourges
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Admirez le pouvoir insigne
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Et la noblesse de la ligne :
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Elle est la voix que la lumière fit entendre
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Et dont parle Hermès Trismégiste en son Pimandre.
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Du Thrace magique, ô délire !
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Mes doigts sûrs font sonner la lyre.
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Les animaux passent aux sons
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De ma tortue, de mes chansons.
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Mes durs rêves formels sauront te chevaucher,
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Mon destin au char d’or sera ton beau cocher
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Qui pour rênes tiendra tendus à frénésie,
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Mes vers, les parangons de toute poésie.
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Les poils de cette chèvre et même
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Ceux d’or pour qui prit tant de peine
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Jason, ne valent rien au prix
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Des cheveux dont je suis épris.
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Tu t’acharnes sur la beauté.
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Et quelles femmes ont été
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Victimes de ta cruauté !
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Ève, Euridice, Cléopâtre ;
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J’en connais encor trois ou quatre.
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Ô lion, malheureuse image
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Des rois chus lamentablement,
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Tu ne nais maintenant qu’en cage
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À Hambourg, chez les Allemands.
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Ne soit pas lascif et peureux
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Comme le lièvre et l’amoureux.
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Mais que toujours ton cerveau soit
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La hase pleine qui conçoit.